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dimanche 30 mars 2014

Le cadeau


Par Agnès Laroche, illustré par Stéphanie Augusseau, Alice jeunesse, Histoires comme ça, Nicodème 3

«Un cadeau bien mystérieux!...»

Il y a cette fébrilité de l'enfant qui sait mais qui ne doit pas éventer la surprise, cette joie pure et candide de voir le plaisir briller dans les yeux de l'autre et il y a Nicodème, le doux, le tendre, le rêveur qui tente de naviguer au mieux dans les eaux parfois houleuses de l'impatience, de supporter bravement l'attente interminable du Jour J. Agnès Laroche tricote adroitement, de sa fine plume, une histoire vieille comme le monde, celle de l'amour plus grand que tout d'un petit garçon pour sa mère. Porté par l'univers visuel de Stéphanie Augusseau, à l'éloquente simplicité du trait et à la sobre mais astucieuse palette, cet album est un délice tout en sensibilité et en nuances. Un petit bijou à offrir à tout vent, et à lire encore et encore dans les bras de Maman.


Lili lui donne: ★ ★ ★ ★ ★



samedi 29 mars 2014

Gustave dort


Par Albert Lemant, L'atelier du poisson soluble et le Musée d'Orsay

«Album hommage à Gustave Doré dans lequel un petit garçon voyage au coeur de l'univers de l'artiste, à la rencontre du baron de Münchhausen, des animaux des Fables de La Fontaine, etc.»

C'est le retour tant attendu d'Albert Lemant et de ses opus divinement farfelus! Cette fois, il se glisse furtivement dans l'univers visuel touffu du prolifique Gustave Doré, architecte infatigable de l'imaginaire de notre enfance. Revisitant malicieusement quelques-unes des oeuvres marquantes de ce célèbre artiste (oeuvres originales reproduites judicieusement à la toute fin du livre), Albert Lemant brode habilement une histoire rocambolesque, faisant des rêves troublants du jeune Gustave Doré une sorte de genèse créative. Traficotant avec humour et éloquence la signature visuelle de Doré, Albert Lemant fait découvrir au lecteur ravi, de ses grands traits fins, évocateurs et joyeusement ébouriffés, l'immense richesse de ces inoubliables illustrations qui ont éveillé nos jeunes esprits au merveilleux. Un album fabuleusement déjanté, où l'art est tout sauf prévisible. À découvrir absolument!


Lili lui donne: ★ ★ ★ ★ ☆

vendredi 28 mars 2014

J'ai laissé mon coeur dans les brumes d'Edimbourg


Par Carolina Lozano, Bayard jeunesse, Sublime Idylle

«À 17 ans, il paraît qu'on n'est pas normal si l'on passe ses soirées dans la bibliothèque de son lycée. Pourtant, je ne suis pas la seule à aimer étudier dans l'enceinte du prestigieux lycée d'Édimbourg, cette antique bâtisse peuplée d'ombres et de mystères. Car aujourd'hui, dans la salle de lecture, j'ai aperçu le plus beau garçon du monde plongé dans un vieux livre. Grand, la peau claire, il ressemblait à l'un de ces guerriers celtes que toute l'Europe redoutait au Moyen Âge. Or, en prêtant à ce garçon des origines aussi lointaines, je ne me suis pas trompée...» 

 Un beau grand jeune homme, séduisant et mystérieux, une jeune orpheline excentrique en exil en Écosse, la terre de l'inexpliqué et du surnaturel, et leur rencontre improbable dans une vieille bibliothèque poussiéreuse fourmillant d'archives: sans aucun doute, on nage en pleine romance, me suis-je dit, grimaçant un brin, en tournant les premières pages. Or, après quelques chapitres, une bise délicieusement frissonnante souffla sur la trame narrative, multipliant les apparitions, découvrant une toile finement tissée entre la Vie et la Mort. Puis, sans crier gare, je fus happée par une intrigue haletante, aux péripéties déboulant habilement et m'entraînant dans la grisaille brumeuse de la fragile frontière entre ces deux mondes. À travers une narration à voix multiples, Carolina Lozano fait vivre une galerie de personnages éclectiques et indubitablement attachants dont le Destin périlleux ne peut que fasciner le lecteur, le poussant à dévorer d'un trait leurs étranges machinations. Un surprenant opus au romantisme à la Tim Burton qui, sans réinventer le genre, envoûte sans vergogne. Avertissement: si vous tenez à vos nuits, ne vous y risquez pas avant le dodo...!


Lili lui donne: ★ ★ ★ ★ ☆


lundi 24 mars 2014

L'autobus


Écrit et illustré par Marianne Dubuc, Comme des géants

«Aujourd'hui, Clara prend l'autobus. Elle ne se doute pas que le voyage sera aussi amusant...»

Je l'attendais en trépignant d'impatience cette parution de la toute jeune édition québécoise Comme des géants: un Marianne Dubuc tout frais, tout chaud, à feuilleter au petit bonheur, c'est toujours une fête! Et c'en fut une, de fête, joyeuse et hilarante comme je les aime! Marianne Dubuc revisite en rigolant la séculaire escapade du Petit Chaperon Rouge, embrouillant astucieusement les cartes, multipliant les rencontres inopinées et exploitant les travers des mythiques personnages des contes pour enfants pour faire rebondir la trame narrative dans tous les sens. Son univers visuel aux traits d'une fine simplicité, regorge d'une foule de détails délirants, relançant habilement l'intrigue en soufflant au lecteur indices coquins et entourloupettes malicieuses. Un petit délice d'album déjanté pour se bidonner en famille. À lire et à relire encore, et encore.



Lili lui donne: ★ ★ ★ ★ ☆


Pouce!


Par Alice Brière-Haquet, illustré par Amélie Graux, Flammarion, Albums du Père Castor

«Moi, mon pouce, c'est mon doudou. Depuis toujours, il me suit partout. Mais voilà qu'aujourd'hui, il a envie de voir le monde... Il sort de ma bouche et "Pouce!", il part à l'aventure!»

L'aventure cocasse et attachante d'un pouce qui s'émancipe joyeusement. Alice Brière-Haquet brode avec tendresse et une sympathique pointe de candeur malicieuse l'histoire rafraîchissante de l'enfance, de ses petites manies réconfortantes et de ses impromptus bonds de géant. L'univers visuel délicieusement ébouriffé d'Amélie Graux, à la palette colorée et aux expressifs crayons de bois, fait s'épanouir avec finesse et éloquence la coquine trame narrative. Un petit bijou d'album à mettre entre toutes ces petites mains qui deviendront grandes.



Lili lui donne: ★ ★ ★ ★ ★

samedi 22 mars 2014

Éclats


http://www.lililesmerveilles.com/2014/03/eclats.html
Scénarisé et illustré par Érik de Graaf, La Pastèque

«Lorsque l'armée allemande envahit les Pays-Bas, le 10 mai 1940, Victor et Esther, deux jeunes amants, sont séparés. Quelques semaines après la capitulation, Victor rentre des combats, il découvre qu’Esther a disparu. Samedi 4 mai 1946 , un an après l’armistice, ils se retrouvent à nouveau, dans un cimetière...»

La guerre bouleverse tout, on le sait: les repères, les amitiés, les valeurs, les idéaux, la vie. Pourtant, elle est souvent dépeinte de façon manichéenne: les Bons soldats contre l'Horrible ennemi. Or, souvent, le Mal se fraie un chemin plus sournoisement, endormant adroitement les vigilances pour mieux gagner du terrain; la frappe-surprise ultérieure n'en est que plus dévastatrice. Lors de la Deuxième Guerre mondiale, les Pays-Bas étaient neutres et entendaient bien le demeurer, surtout que l'Allemagne semblait vouloir respecter leur non-engagement dans le conflit. Or, tout a basculé quand la confiance d'un peuple a été trahie... Dans le premier tome de ce prometteur diptyque, Erik de Graaf raconte les débuts de cette guerre ravageuse à travers la jeunesse néerlandaise des petits villages. Comment ils ont été de jeunes militaires cantonnés chez l'habitant pendant un long moment, humbles îlots de protection, pour ensuite être parachutés dans une guerre qu'ils n'avaient pas vu venir et qui les a rapidement fait capituler. Comment la jeunesse a vécu ce coup d'éclat, le deuil d'êtres chers et l'occupation allemande de plus en plus contraignante par la suite. Tout en nuances et en finesse, Erik de Graaf brode une adroite scénarisation jonglant astucieusement avec trois niveaux de narration: le présent, en 1946, après la guerre, le passé, les premiers éclats de la guerre en 1940-41, et les souvenirs plus anciens d'avant 1940. Or, si la multiplication des retours en arrière entraîne souvent la confusion chez le lecteur, cette fois, grâce à l'utilisation de filtres visuels distincts (couleurs pour le présent, sépia pour le passé et noir et blanc pour l'ancien), la trame narrative demeure limpide et éloquente, attisant la curiosité du lecteur par un récit fragmentaire et des silences nourrissant judicieusement le mystère. Portée par une habile mise en images, à la délicieuse palette vieillotte, et aux traits simples et affirmés, cette fiction fortement inspirée d'une réalité méconnue en Amérique du Nord est indubitablement remuante (une fascinante annexe documentant les sources historiques du récit clos d'ailleurs le roman graphique). Un inoubliable opus, juste et émouvant, dont on espère ardemment la suite!...


Lili lui donne: ★ ★ ★ ★ ☆

mardi 18 mars 2014

M. Flux


http://www.lililesmerveilles.com/2014/03/m-flux.html
Par Kyo Maclear et Matte Stephens, La Pastèque, Pamplemousse

«Il était une fois un garçon prénommé Martin, qui n’aimait pas le changement. En fait, ce n’est pas tant qu’il n’aimait pas le changement, mais plutôt qu’il ne le connaissait pas. Martin vivait avec sa famille dans une ville jolie, mais prévisible. Jusqu’au jour où un certain Monsieur Flux fit son entrée dans le quartier à bord d’une vieille caravane bruyante. Non seulement Monsieur Flux connaissait le changement, mais il en était friand.»

Ode à l'imprévisible et au farfelu. Chamboulant l'immuable quiétude des esprits engourdis, le sympathique (et non moins saugrenu) M. Flux est parachuté dans un (trop) douillet quartier. À grands coups de propos délirants et d'idées délicieusement déjantées, il fera tomber les oeillères du voisinage, ouvrant la porte à la créativité sans compromis. Kyo Maclear brode une trame narrative inusitée de sa fine plume, entremêlant judicieusement fiction et histoire de l'Art par le biais du fameux M. Flux, incarnation audacieuse de l'essence du mouvement artistique Fluxus, et évitant avec adresse le piège de l'album didactique. Portée par l'univers visuel ébouriffé de Matte Stephens, au trait délicieusement rétro, cette histoire singulière fait voir autrement le quotidien, embrassant l'impromptu et faisant fuir l'apathie. Un clin d'oeil à Lewis Carroll peut-être, qui, dans son «Alice de l'autre côté du miroir», soutenait que pour avoir l'esprit ouvert, il fallait s'y entraîner chaque jour, et «croire jusqu'à six choses impossibles avant le petit-déjeuner». À découvrir absolument!


Lili lui donne: ★ ★ ★ ★ ☆

lundi 17 mars 2014

La tête de l'emploi


Par David Foenkinos, Flammarion Québec

«À 50 ans, Bernard se voyait bien parti pour mener la même vie tranquille jusqu'à la fin de ses jours. Mais parfois l'existence réserve des surprises... De catastrophe en loi des séries, l'effet domino peut balayer en un clin d oeil le château de cartes de nos certitudes. Et le moins que l'on puisse dire est que cet homme ordinaire, sympathique au demeurant, n'était pas armé pour affronter ce qui l'attendait. Buster Keaton post-moderne, il va devoir traverser ce roman drôle et mélancolique pour tenter de retrouver sa place dans un monde en crise.»


À lire un jour...

Sam


Par François Blais, L'Instant même

«D’entrée de jeu, un carton de livres soldés. Parmi une collection d’ouvrages québécois très XIXe siècle se trouve une pièce de choix, le journal de Marie Bashkirtseff, une contemporaine de Maupassant. Et tout au fond de la boîte, une centaine de pages du journal de S***, une diariste chevronnée, qui plus est, native de Grand-Mère, comme le narrateur. Il n’en faut pas davantage pour que celui-ci s’engage dans une quête pour retrouver celle qu’il baptise Sam et qu’il croit être "la femme de sa vie". D’indices en suppositions, de coïncidences en recoupements établis grâce à son journal, il la suit à la trace : à la campagne, dans sa petite maison du chemin Saint-François-de-Pique-Dur, à Limoilou, là où habite sa mère, et même jusqu’à Parent, en Haute-Mauricie. Cette petite musique familière et ironique, jouant en mode continu dans le récit du quotidien très ordinaire d’une trentenaire insaisissable, est bien celle de François Blais, passé maître dans l’art d’exploiter le filon du journal intime. Avec Sam, son huitième roman, il se pose en meneur d’un habile jeu de piste. Mais c’était sans compter sur le solide tempérament critique et agissant de son narrateur. Le journal de S*** pourrait bien devenir l’enjeu d’une rivalité imprévue entre l’auteur et son personnage, ainsi qu’une réplique vive à la question posée à la fin de Vie d’Anne-Sophie Bonenfant : "Depuis quand un auteur n’a-t-il pas tous les droits sur son personnage?"»


À lire un jour...

dimanche 16 mars 2014

Coeur de Pierre


Scénarisé par Séverine Gauthier, illustré par Jérémie Almanza, Delcourt Jeunesse

«Il est né avec un coeur de Pierre, elle, avec un coeur d'artichaut...»

Une histoire de coeurs, de ceux qui vibrent, de ceux qui saignent, et de ceux qui sont muets. Séverine Gauthier brode finement un singulier triangle amoureux, classique des classiques, qui sait surprendre avec justesse et émouvoir sans crier gare. Sa plume sensible fait valser les rimes avec adresse, et passer le lecteur du rire aux larmes avec une simplicité désarmante. Évoquant un monde étrange et farfelu, lointain parent du grinçant de Tim Burton, l'univers visuel à l'imaginaire touffu de Jérémie Almanza exprime, de sa riche et éloquente palette, la douce complexité de l'âme des personnages: l'amour et l'abandon, la candeur et la désillusion, le bonheur et le désespoir. Un opuscule d'une exquise délicatesse qui fera frémir sans faillir votre coeur d'artichaut.



Lili lui donne: ★ ★ ★ ★ ★

samedi 15 mars 2014

La croccinelle

Par Michaël Escoffier, illustré par Matthieu Maudet, Frimousse

«Une histoire complètement à l'Ouest!»

Un improbable et désopilant western, à la sauce «Petit Chaperon Rouge». Détournant habilement la structure et les archétypes des contes classiques, et avec son humour habituel, Michaël Escoffier tricote une savoureuse histoire à dormir debout, plongeant le lecteur dans un univers déjanté où règnent l'incroyable et le rocambolesque. Évoluant dans une ambiance visuelle à la Lucky Luke, aux teintes sablonneuses et aux traits incisifs, cet album bien ficelé chambarde joyeusement les repères; comme quoi dans le Far West, il ne faut jamais se fier aux apparences. Une rigolade assurée!



Lili lui donne: ★ ★ ★ ★ ☆

vendredi 14 mars 2014

Juste en soi



Par Martine Delerm, Seuil jeunesse


«Juste trouver les couleurs en soi
Sortir de sa coquille juste pour respirer un peu
Juste se dire qu’on aurait pu avoir sept enfants
Être juste un flocon et fondre
Juste confondre les heures et les secondes
Juste se dire qu’on aurait dû aimer les cours de gym
Être juste un silence et crier
Juste en soi trouver l’autre»

«Regarder dehors juste pour se sentir dedans. [...] Juste poser son ombre, légère, sur le sol. [...] Juste préférer le gris de novembre.» D'une miette d'âme à l'autre, Martine Delerm brode un singulier petit carnet de voyage au centre de soi-même. Sa plume, éthérée et toute en simplicité, souffle des mots qui savent dire, des mots qui font voguer les pensées, des mots comme une bouteille à la mer. Nichés au coeur d'un univers visuel tout en douceur, à la palette marine et au crayon tendre, ces mots s'épanouissent, suggérant sans froisser les sensibilités, évoquant le réel sans s'y enfermer, faisant bourlinguer délicieusement le lecteur dans son imaginaire. Une émouvante bulle hors du temps, à déguster sans se presser.


Lili lui donne:  ★ ★ ★ ★ ☆

jeudi 13 mars 2014

La fille qui n'aimait pas les fins

Par Yaël Hassan et Matthieu Radenac, Syros, Tempo

«Maya aime beaucoup les livres. Sa mère l'inscrit à la bibliothèque. Dans ce lieu paisible et studieux, Maya va faire la rencontre d'un vieux monsieur plein de fantaisie. Il l'intrigue beaucoup mais elle se sent très proche de lui. Qui est réellement le mystérieux Manuelo? La plus belle des surprises attend la jeune Maya...»

Ouvrir un livre pour en lire le début seulement avant de se lancer dans les tâches de la journée,... et le dévorer d'une traite, tant pis pour le lavage à faire! Yaël Hassan et Matthieu Radenac m'ont bien eue: en quelques pages seulement, développant une prémisse prometteuse et faisant entrer en scène cet attachant-et-mystérieux-vieux-monsieur-de-la-bibliothèque, leur histoire m'a happée immédiatement, muselant joyeusement les obligations terre-à-terre de mon quotidien. Si leur plume à deux voix est par moment maladroite, faisant dégouliner la narration d'un brin trop de bons sentiments et laissant entrevoir le dénouement très tôt dans la trame, les personnages, leurs vies entremêlées, leurs drames et leurs secrets ne manquent pas de fasciner. Un roman qu'on lit l'âme vibrante et le coeur à l'étroit.


Lili lui donne: ★ ★ ★ ★ ☆

lundi 10 mars 2014

Polaroïd


Scénarisé par Séverine Vidal, illustré par Julien Castanié, Frimousse

«Anna reçoit tous les matins un polaroïd. Elle ne sait pas qui lui envoie. Des photos d'elle petite puis des images plus récentes. Elle a peur. Elle raconte tout ça dans son journal intime: carnet qui passera ensuite entre les mains de ses amis Manel, Clo et Mollusque jusqu'à la révélation.»

Pétillant petit mystère entre amis. Séverine Vidal tricote une trame astucieuse, entremêlant les points de vue dans une habile narration à quatre voix; les péripéties déboulent et les révélations se multiplient à un rythme effréné, en oubliant toutefois, par moment, de donner le temps à l'intrigue de prendre racine dans l'imaginaire du lecteur (un tout léger bémol). Nourri par l'univers visuel aux traits simples mais éloquents de Julien Castanié, cet opus hybride, à mi-chemin entre le roman graphique et la fiction illustrée, étonne par le dynamisme audacieux de sa forme narrative. C'est un plongeon haletant et singulier dans la fin de l'adolescence, ses tumultes et ses changements de cap; un bouquin à dévorer sans tarder.


Lili lui donne: ★ ★ ★ ★ ☆

dimanche 9 mars 2014

Histoire de la maison qui voulait déménager


Par Hervé Walbecq, École des loisirs, Neuf

«Il y a les fenêtres qui s’envolent, comme des papillons multicolores.
Il y a la voiture garée dans la salle de bains, le salon transformé en piscine, et le placard à chaussures déguisé en salle à manger. 
Le papier peint dont on fait une robe, et les tuiles qui composent un manteau.
Il y a le paillasson qui voudrait devenir une couverture pour enfin dormir sur un lit. 
L’arbre du jardin qui part retrouver ses amis la nuit dans la forêt. 
Et la maison qui s’en va jusqu’à la mer pour faire une croisière, en oubliant la boîte aux lettres.
Si tout restait toujours à sa place, le monde serait terriblement ennuyeux. Par chance, les maisons aussi ont le goût de l’ailleurs.»

J'ai tergiversé longuement avant de choisir pour vous un extrait de cet opus joyeusement déroutant: toutes les pages m'interpellaient, les phrases me faisaient de l'oeil, les illustrations me titillaient l'imaginaire, j'aurais voulu tout partager, tout souligner, tout vous faire découvrir. C'est qu'Hervé Walbecq s'est définitivement surpassé en concoctant le troisième volet de sa singulière série d'histoires insolites; de sa plume fine et coquine, il a su allier audace, sensibilité et humour, plongeant le lecteur dans les délices d'un monde rocambolesque, où tout est possible... surtout ce qui ne l'est pas! Au-delà du plaisir à bousculer les conventions, à désarçonner habilement, Hervé Walbecq raconte avec justesse la vie et ses élans, aussi saugrenus soient-ils; une bouffée de candeur excentrique et d'authenticité déjantée à laquelle vous ne pourrez que succomber. Sublime.

(... et, tel que promis, pour vous mettre l'eau à la bouche, voici une miette de ce bonheur d'ovni littéraire, tirée de l'histoire Je déteste qu'on me prenne pour une petite cuillère
 «Je déteste qu'on me prenne pour une petite cuillère. Toujours la tête à l'envers, les lunettes au fond de la tasse, du sucre plein les yeux, c'est très désagréable. Pourtant, mon papa n'a vraiment pas l'air de comprendre. Le matin, dans la cuisine, il est tellement fatigué qu'il fait n'importe quoi. Il prend le visage de mon frère pour une tartine et lui étale du beurre sur le nez, il sucre les cheveux de ma maman puis il les mange comme une barbe-à-papa, il trempe le chat dans son chocolat, met les journaux dans le grille-pain, les céréales dans la gamelle du chien... et moi, il me prend toujours pour une petite cuillère. C'est vraiment fatigant. [...]»)


Lili lui donne: ★ ★ ★ ★ ★





mardi 4 mars 2014

C'est pas grave


Par Jo Hoestlandt, Milan, Macadam

«Portrait en neuf courts chapitres de Chloé, une adolescente de 14 ans, à la fois et selon les heures attachante, insupportable, heureuse et malheureuse, jalouse et généreuse, fière et humiliée.»

Une percutante tirade, impétueuse et vraie. Jo Hoestlandt donne la parole à l'adolescence, à cette voix vive, écorchée qui hurle sans compromis son désir de se faire entendre, qui se rebelle contre les oeillères désillusionnées de l'âge adulte. Tout en authenticité et en lucidité, il laisse Chloé dire la grisaille et les montagnes russes, la houle et les écueils d'un parcours cahoteux, mais aussi les éclaircies, les miettes d'un bonheur inattendu, les rencontres sans crier gare et les complicités étonnantes. Parce que tout n'est pas noir ou blanc, quand on est ado. Parce que la grisaille peut aussi, quand le brouillard se tasse, cacher l'entrée d'une clairière inespérée. Un opuscule poignant à l'intelligence fine, celle de donner la parole à l'intensité échevelée et à la sincérité bouillonnante de l'adolescence sans tenter d'en dompter les ruades, en résistant à l'envie de la faire rentrer dans le moule. Bouleversant.


Lili lui donne: ★ ★ ★ ★ ★