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dimanche 27 février 2011

La fabrique des filles - L'éducation des filles de Jules Ferry à la pilule

Par Rebecca Rogers et Françoise Thébaud, Textuel

«"On ne naît pas femme, on le devient". Des leçons de broderie aux cours d'éducation sexuelle, le XXe siècle est porteur d'une évolution, à la fois spectaculaire et paradoxale, de l'éducation des filles, naviguant entre l'enseignement d'un éternel féminin et une émancipation durement conquise. Cet ouvrage richement illustré met en scène ce cheminement à travers 200 documents souvent inédits : journaux intimes, cahiers d'élèves, courrier du coeur... Les lectures destinées à apprendre aux petites filles leur place en société au début du siècle sont aussi édifiantes que l'enseignement du dévouement familial dans les années 1960. Fort heureusement l'engagement d'institutrices pionnières, les revendications de la jeunesse et la révolte de féministes enrayeront le dispositif éducatif, à l'école comme à la maison, pour fabriquer des épouses et des mères modèles.»

Un essai dynamique et fort intéressant que proposent Rebecca Rogers et Françoise Thébaud. Le contenu s'adresse à un public large (un sujet aux deux pages en moyenne), le ton utilisé est accessible et invitant, et la conception graphique tout à fait idéale pour les lecteurs habituellement allergiques à la sécheresse des essais (et j'en suis!). Si l'auteur survole l'évolution de l'éducation des filles en France, usant de référents parfois un peu hermétiques pour les lecteurs non-européens, l'intérêt de cet essai est relativement universel, réveillant la féministe en chacun de nous, attisant le désir de la poursuite de l'épanouissement féminin, peu importe son origine. Loin d'être militant à outrance, il s'agit d'un opus agréable à lire, à feuilleter (grâce à ses artéfacts nombreux et judicieusement choisis)... et peut-être même à léguer à la génération de femmes qui suivra! Chapeau!


Lili lui donne: ★ ★ ★ ★ ☆

samedi 26 février 2011

Arsène veut grandir

Par Séverine Vidal, illustré par Lionel Larchevêque, Alice Jeunesse

«Arsène n’est plus un bébé depuis longtemps. Il veut un peu d’autonomie, avoir une amoureuse, faire une boum et choisir ses habits le matin. En deux mots, Arsène veut faire comprendre à tous — et d’abord à sa maman — qu’il est grand! Il en a vraiment assez des histoires du soir, des surnoms ridicules (surtout devant les copains!), de ne pas regarder ce qu’il veut à la télé, de ne pas choisir ses vêtements le matin... La guerre est déclarée ! Sa maman va avoir du fil à retordre avec Arsène, qui prend l’avantage au début... Mais rira bien qui rira le dernier : quand sa mère décidera de jouer le jeu et de le traiter comme un grand, Arsène se rendra compte à ses dépens que cela n’a pas que des avantages de ne plus être le petit chéri de sa maman... Un véritable chef-d’œuvre d’humour et de finesse!»

Sympathiques aventures d'Arsène-le-grand! Séverine Vidal brosse de sa plume coquine le portrait d'une famille où il semble faire bon vivre, malgré les récriminations d'Arsène. Sur un ton un brin franchouillard, pour les lecteurs du Québec du moins, elle met en lumière avec beaucoup d'humour des bijoux de situations d'enfance où les parents peuvent parfois être un peu envahissants pour un autonome en herbe. Quant aux traits simples mais éloquents de Lionel Larchevêque, ils sont un tremplin parfait pour les tribulations imaginées par Vidal. Un duo scénariste-illustrateur à suivre!


Lili lui donne: ★ ★ ★ ★ ☆

Knuffle Bunny - A Cautionary Tale

Par Mo Willems, Hyperion Books for children, Knuffle Bunny 1

«Trixie, Daddy, and Knuffle Bunny take a trip to the neighborhood Laundromat. But the exciting adventure takes a dramatic turn when Trixie realizes somebunny was left behind.»

Une conception graphique surprenante et originale, à mi-chemin entre le réel et la fiction; cela dit, je ne suis pas encore certaine de la sensibilité qui peut émaner de ces images hybrides. Peut-être un poil trop froid pour un album jeunesse. Par contre, la plume habile de Mo Willems fait naître, pour le plus grand plaisir des lecteurs, un délicieux personnage principal, tablant comme toujours sur l'efficacité incontestée des situations du quotidien qu'elle revisite avec humour et finesse. Une histoire très attachante qui fera rejaillir un bouquet de souvenirs d'enfance...


Lili lui donne: ★ ★ ★ ★ ☆


Pour le lire en version française

I am Going!

 Par Mo Willems, Hyperion Books for Children, An Elephant & Piggie Book

«In I Am Going! Piggie ruins a perfectly good day by telling Gerald he is going. But if Piggie goes, who will Gerald play ping-pong and wear silly hats with?»

Un album hilarant, d'une simplicité géniale! La plume de Mo Willems continue de faire sourire en croquant sur le vif des situations familières que Gerald et Piggie se font un plaisir de faire redécouvrir au lecteur sous le signe de l'humour! Une réussite sur toute la ligne! Triste qu'il ne soit pas encore traduit en français... même si je doute que toute la saveur des dialogues minimalistes soit préservée au cours du processus de traduction!


Lili lui donne: ★ ★ ★ ★ ★ 

Le Chandail de Hockey

Par Roch Carrier, illustré par Sheldon Cohen, Toundra

«Un jeune garçon, fervent admirateur de l’équipe de hockey des Canadiens de Montréal et s’identifiant à la légende qu’était Maurice "le Rocket", Richard doit remplacer son chandail des Canadiens, déchiré, troué et trop petit. Il doit faire face au rejet de ses amis lorsque sa mère lui commande un chandail qui, à sa grande tristesse, ne représente pas son équipe ni son joueur de hockey préféré mais plutôt l’équipe rivale des Maple Leafs de Toronto.»

J'avais trop d'attentes concernant cette histoire mythique de Roch Carrier, je crois... J'ai lu l'album avec plaisir, j'ai souri devant le grand désarroi du petit Roch face à l'erreur de livraison impardonnable de "M. Eaton"... mais je n'ai pas été vraiment émue ou touchée. Comme si la magie n'opérait pas tout à fait... Peut-être est-ce dû aux illustrations de Sheldon Cohen, dont le style n'est pas sans rappeler celui de Miyuki Tanobe; malheureusement, la vie pétillante des illustrations de Tanobe n'y est pas, et seule reste une mise en images plutôt conventionnelle. Ou alors, peut-être est-ce la mise en page de l'album qui n'est vraiment pas propice à lecture, coinçant des lignes et des lignes de texte dans un tout petit espace, ne laissant pas l'histoire de Carrier respirer? Je ne saurais trop dire ce qui m'a gardé les pieds résolument sur terre, mais c'est bien dommage pour cette savoureuse anecdote que Roch Carrier a pourtant partagé avec des générations de futurs joueurs de hockey... Elle aurait pu faire un tour du chapeau, mais malheureusement, cet album finit pour moi sur le banc des punitions...


Lili lui donne: ★ ★ ★ ☆ ☆

Please Bury Me in the Library

Par J. Patrick Lewis, illustré par Kile M. Stone, Houghton Mifflin Harcourt

«There's nothing like curling up with a good book, but you have to be careful. Before you know it, a minute turns into an hour, an hour turns into a day, and a day may turn into . . . eternity. Inspired by the likes of Edward Lear, X. J. Kennedy, and Lewis Carroll, the author of Arithme-Tickle and Scien-Trickery has created a collection of original poems about books and reading that range from sweet to silly to laugh-out-loud funny. Newcomer Kyle M. Stone's clever, witty, and endearing paintings make this the perfect treat for book lovers of all ages.»

Un saut agréable et divertissant dans le monde de la poésie enfantine! La plume de J. Patrick Lewis est habile et coquine, proposant une poésie définitivement ludique. Tous les poèmes ne sont pas amusants, ou intéressants, mais il y a quelques beaux petits bijoux, dont "Great, Good, Bad". Un livre à feuilleter et à déguster en famille, en plongeant dans l'univers réconfortant et chaleureux des illustrations que Kyle M. Stone sème joyeusement au fil des pages...


Lili lui donne: ★ ★ ★ ★ ☆

vendredi 25 février 2011

Le mangeur de sons


Par Christos Ortiz, illustré par Laurance Quentric, Les 400 coups

«"Je suis un ogre. Mais pas n’importe lequel : je suis un ogre mangeur de sons! Je mange tous les sons, car à mes oreilles, ils sont tous bons ! Je dévore les rires quand ils s’épuisent, les colères grosses comme le tonnerre. J’avale le fracas des avions et les ronrons de vos chatons.  Je sirote le glouglou des bouteilles et les murmure à vos oreilles! Je croque les bruits et les cliquetis, je suce les sons comme des bonbons!" La belle histoire d’un ogre qui mange tous les bruits du quotidien. Mais qu’arrive-t-il lorsque la pollution sonore se fait trop présente?»

Quel album superbe! Un pur délice! Christos Ortiz fait virevolter sa plume légère, faisant tinter et rimer ses mots, brossant joyeusement le portrait de cet ogre sympathique à la gourmandise sonore. Et puis, la conception graphique de Laurance Quentric est tout simplement stupéfiante: un habile mélange de collages et d'illustrations, vibrant, éloquent, sublime. Un album coup de coeur, à relire mille fois...


Lili lui donne: ★ ★ ★ ★ ★ 

Joséphine

Par Pénélope Bagieu, Éditions Jean-Claude Gawsewitch, Joséphine 1

«Joséphine se cherche un fiancé, se promène sur Meetic, s’achète des sacs d’un prix indécent, n’a jamais rien à se mettre et commence le sport demain, c’est promis. Évidemment, toute ressemblance avec de vraies jeunes femmes de la vraie vie ne serait que pure coïncidence…»

Une petite BD légère et confo, à lire d'un oeil romantique, lovée sur le divan. Pénélope Bagieu propose des planches aux illustrations cocasses, mettant en scène une Bridget Jones française fort sympathique. Les scénarios quoiqu'un brin franchouillards sont amusants, font sourire... et permettent à la célibataire en soi de se reconnaître à travers les tribulations de Joséphine. Agréable petit plaisir coupable.


Lili lui donne: ★ ★ ★ ★ ☆

La petite fille à la jambe de bois

Par Hélène Castelle, illustré par Marion Arbona, Les 400 coups

«Penny n’avait que six ans et ne croyait déjà plus aux contes de fées. Pourtant elle en avait lu beaucoup et elle les connaissaient sur le bout de ses doigts. Elle savait que dans ces histoires, il y a une chose qui n’existe pas : les princes et les princesses n’y ont jamais de jambes de bois. Voici donc le drame de cette curieuse petite fille. Elle était née comme ça : une tête, deux bras et une brindille. Et croyez bien qu’à ce jour aucun prince n’a trouvé ça charmant!»

Histoire étrange, un brin décousue, que propose la plume beaucoup trop ostentiblement pédagogique d'Hélène Castelle: le déroulement est lourd, et on sent grincer les rouages maladroits de l'apprentissage de la différence jusqu'à la toute fin, bâclée elle aussi. Toutefois, les illustrations sont sublimes et touchantes, grâce aux traits sensibles, colorés et chauds de Marion Arbona. Un vrai délice pour les yeux... alors, oubliez les mots et plongez dans le singulier univers graphique de cet album!


Lili lui donne: ★ ★ ★ ☆ ☆

jeudi 24 février 2011

Meurtriers sans visage

Par Henning Mankell, Seuil, Points, Kurt Wallander 1

«En pleine campagne suédoise, dans une ferme isolée, un couple de paysans retraités est torturé et sauvagement assassiné. Avant de mourir, la vieille femme a juste le temps de murmurer un mot : " étranger ". Il n'en faut pas plus pour qu'une vague de violence et d'attentats se déclenche contre les demandeurs d'asile d'un camp de réfugiés de la région. Les médias s'emparent du fait divers et lui donnent une résonance nationale. La pression augmente sur les épaules de l'inspecteur Wallander, chargé de mener l'enquête. Il va devoir agir vite, avec sang froid et détermination, et sans tomber dans le piège de la xénophobie ambiante qui brouille les pistes... La première enquête du désormais célèbre Kurt Wallander, personnage phare des romans de Henning Mankell.»


Intrigue enlevante, sans conteste. Henning Mankell fait découvrir au lecteur l'univers sombre et tortueux que peut être la société. Si la plume de Mankell est parvenue à m'entraîner dans ses rouages dès les premières pages, j'ai été un brin déçue par son manque d'épanouissement, de finesse. Bien sûr, il s'agit d'une traduction; la version suédoise originale est sans doute plus nuancée, plus travaillée, proposant sûrement quelque chose de mieux (je l'espère) que le peu de style littéraire que j'ai eu à me mettre sous la dent... On est loin d'Elizabeth George et de sa délicieuse complexité. À consommer pour l'histoire, donc. Avidement, mais sans grand frisson littéraire.


Lili lui donne: ★ ★ ★ ☆ ☆

lundi 21 février 2011

Des livres d'enfants à la littérature de jeunesse

Par Christian Poslaniec, Gallimard, Découvertes Gallimard

«Talentueuse et imaginative, portée par des médiateurs enthousiastes, reconnue par l'école et l'université, séduisant des publics toujours plus larges, la littérature de jeunesse est aujourd'hui une littérature majeure. Son histoire remonte au milieu du XIXe siècle, lorsque l'alphabétisation massive et le développement des techniques d'impression permirent son émergence. Deux libraires-éditeurs, Louis Hachette et Pierre-Jules Hetzel, réinventent un genre, encore très dépendant de l'école et de la religion, et publient des romans pour les enfants signés par la comtesse de Ségur ou Jules Verne. La littérature de jeunesse était née et avec elle l'enfant-lecteur. Christian Poslaniec nous guide dans cette histoire touffue qu'il parsème de petits cailloux blancs : Babar, les Albums du Père Castor, Le club des 5, Les Contes du chat perché, Harry Potter...»

Essai intéressant et présentation graphique accrocheuse, un Découvertes Gallimard classique, quoi! Christian Poslaniec offre au lecteur un fascinant plongeon dans le passé, la découverte d'une ère où l'enfance n'existait pas, où l'enfant n'était qu'un moule vide qu'il fallait s'efforcer de remplir de valeurs vertueuses et morales, sans oublier (heureusement!) de décrire la merveilleuse évolution du marché de la littérature jeunesse, qui a ouvert, entre autre, les portes de l'imaginaire et de la lecture ludique aux enfants trop longtemps privés de cet exutoire délicieux qu'est la littérature sans agenda caché! Un beau petit morceau d'histoire à découvrir, même si, dans cet essai, les référents de l'évolution de la littérature jeunesse sont principalement européens. 


Lili lui donne: ★ ★ ★ ★ ☆

vendredi 18 février 2011

Bill Chocottes, le héros qui avait peur

Par Dominique Watrin, illustré par Élisabeth Eudes-Pascal, Les 400 coups

«Dans toutes les histoires pour enfants, il y a deux sortes de personnages : les gentils avec une tête de gentil et les méchants avec une tête de méchant. Mais qu'arrive-t-il le jour où l'illustratrice se trompe et crée un méchant avec une tête de gentil et un gentil avec une tête de méchant?»

Concept graphique fort intéressant, comme si Elisabeth Eudes-Pascal travaillait sous nos yeux, avec crayons, ciseaux et ruban adhésif! Quant à l'histoire, eh bien, l'idée de base est prometteuse: un méchant à l'air gentil et un gentil à tronche de méchant. La plume de Dominique Watrin est habile certes, jouant finement avec les répétitions, les retours en arrière et la naïveté du lecteur... mais j'ai été un brin déçue; je ne me suis pas sentie transportée par l'intrigue. Il manque un petit rien de fluidité pour que la magie opère... Un joli album à feuilleter malgré tout, question de briser nos préjugés de contes de fée!


Lili lui donne: ★ ★ ★ ☆ ☆

jeudi 17 février 2011

La belle Adèle

Par Marie Desplechin, Gallimard Jeunesse

«Adèle en assez. Pourquoi devrait-elle se donner du mal pour se maquiller et s'habiller, comme les filles de sa classe? Est-ce le plus sûr moyen de ne pas se faire remarquer? D'être normale? Et Frédéric... Il est gentil, il est même tragiquement gentil. N'est-ce pas le pire des défauts pour un garçon? Adèle et Frédéric doivent trouver d'urgence une stratégie de survie. Ils ont alors une idée lumineuse... Marie Desplechin est sans égale pour traduire avec humour les péripéties de la vie!»

Une sympathique épopée adolescente menée habilement par la plume fine et agile de Marie Desplechin. Ses deux personnages principaux sont attachants à souhait et leur aventure délicieusement rocambolesque! Un petit opuscule savoureux à ne pas manquer!


Lili lui donne: ★ ★ ★ ★ ☆

mercredi 16 février 2011

La légendaire histoire des douze soeurs Flûte

Par Vincent Cuvellier, illustré par Ronan Badel, Gallimard Jeunesse, Giboulées

«Dans un château, M. et Mme Flûte ont douze filles : une marrante, une dure, une rebelle, des jumelles, une laide, une étonnée, deux Charlotte, trois Béatrice. Mais, un jour funeste, le couple donne naissance à un garçon.»

Attachante incursion dans le monde saugrenu de la famille Flûte. La plume de Vincent Cuvellier tisse une histoire remplie de tours et de détours, de fous rires et de coups du sort; ses personnages sont cocasses et leurs péripéties charmantes. La structure du récit est un brin déconstruite, mais au fond, comment pourrait-elle être autrement qu'à l'image de la famille Flûte, brouillonne et vivante? Quant aux illustrations de Ronan Badel, elles sont douces et loquaces, faisant découvrir les mille et une facettes (et cachettes!) d'une famille mémorable! Un petit délice fantaisiste pour les après-midi trop tranquilles...


Lili lui donne: ★ ★ ★ ★ ☆

Marina

Par Carlos Ruiz Zafon, Pocket Jeunesse

«Solitaire, Oscar aime se promener après les cours dans les rues envoûtantes de Barcelone. Un jour, il rencontre la jolie et mystérieuse Marina. Liés par un amour de plus en plus fort, les adolescents n'ont peur de rien, pas même de suivre une femme au comportement bizarre... Qui est-elle et pourquoi se rend-elle sur une tombe gravée d'un papillon noir? Lancés sur la piste d'une énigme qui hante la ville depuis trente ans, Oscar et Marina risquent de se perdre...»

Tendre aventure, sombre et inquiétante, qui s'épanouit tout doucement par le biais de la plume sensible et troublante de Carlo Ruiz Zafon. Si ma fébrilité de dévoreuse de livres m'a fait piaffer d'impatience au tout début de ce roman qui prend son temps pour installer le décor, j'ai ensuite été emportée par l'intrigue, soufflée hors de la réalité, ne dormant que d'un oeil, envoûtée et un brin effrayée par cet univers étrange, à mi-chemin entre le rêve et le cauchemar... Une prose humaine et délirante, très touchante, qui n'est pas sans rappeler le singulier Tim Burton, ange noir du cinéma. Une belle histoire d'amour et de mort, oscillant habilement entre le conte de fées et le musée aux horreurs.


Lili lui donne: ★ ★ ★ ★ ☆

lundi 14 février 2011

Barbouillette!

Par Michèle Marineau, illustré par Manon Gauthier, Québec Amérique

«Pétronille, la cadette de la famille Guille, possède un don bien particulier. Quand elle s’écrit "Barbouillette!"les couleurs envahissent la salle de bain, la maison, le quartier, la ville et le monde entier! Le diagnostic est posé : elle souffre de colorite aiguë. Mais comment faire pour justifier son absence à l’école? Une colorite, ce n’est pas commun!»

Histoire amusante que la tendre plume de Michèle Marineau brosse habilement: la famille de Pétronille est tellement chouette qu'on a le goût de s'y blottir! Surtout lorqu'on voit la frimousse que Manon Gauthier leur a choisie... Ses illustrations mi-aquarelle, mi-collage sont remplies d'une sensibilité et d'une douceur incroyables! Un duo auteure-illustratrice tout simplement savoureux! À lire mille et une fois...


Lili lui donne: ★ ★ ★ ★ ★  

vendredi 11 février 2011

Pourquoi lire?

Par Charles Dantzig, Grasset

«"La lecture n'est pas contre la vie. Elle est la vie, une vie plus sérieuse, moins violente, moins frivole, plus durable, plus orgeuilleuse, moins vaniteuse, avec souvent toutes les faiblesses de l'orgueil, la timidité, le silence, la reculade. Elle maintient, dans l'utilitarisme du monde, du détachement en faveur de la pensée. Lire ne sert à rien. C'est pour cela que c'est une grande chose. Nous lisons parce que ça ne sert à rien." Des conseils, des douceurs, des rosseries, et une conception de la lecture comme "sœur de la littérature", toutes deux marchant ensemble dans un combat contre le temps. Une philosophie de la lecture qui fait s'exclamer, s'enthousiasmer, applaudir, et qui ne donne qu'une envie : (la) relire.»

Pourquoi, moi, la dévoreuse de fiction, me suis-je plongée dans cet essai sur la littérature, essai à l'air aride et sec d'une lecture universitaire obligatoire? Eh bien, tout simplement parce qu'il a piqué ma curiosité: cette interrogation en forme de titre et cet extrait si éloquent en quatrième de couverture... et puis, oui, peut-être bien que la lectrice peinte sur le bandeau a aussi interpellé le rat de bibliothèque en moi! Je suis comme ça, intuitive, subjective, humaine, quoi... Et puis maintenant qu'il est lu, cet essai, que puis-je bien en dire? Que la plume de Dantzig, malgré un niveau de langage très soutenu, parfois un brin hermétique, est parvenue à me captiver, à m'ouvrir grand la porte de son contenu, par sa forme accessible, ses chapitres courts et anecdotiques? Que la question de la lecture semble, pour l'auteur, un prétexte pour discuter de sa vision exclusive (et disons-le, élitiste) de la littérature avec un grand "L"?  Que sa notion de «vrai» lecteur (c'est-à-dire celui qui ne lit que pour savourer la Littérature - avec un grand "L" -  et pour s'approprier cette Littérature en griffonnant dans les marges) est légèrement réductrice et snob? Que pour moi, lectrice depuis toujours, l'important n'est pas pourquoi l'on lit, ni ce que l'on lit, mais bien de lire, point? Ou alors que malgré ces divergences majeures d'opinion, et cette brise de mépris, ressentie à quelques reprises durant ma lecture, s'adressant à la «non-initiée» que je semble être selon les propos de l'auteur, j'ai découvert une vision des mots fort stimulante? Tout ça à la fois, j'imagine...
J'ai longuement hésité à me commettre au sujet de ce livre, surtout après avoir reçu comme une flèche la perception de l'auteur concernant ceux qui, selon lui, «attaquent» les créateurs de la Grande Littérature: "Les gens qui nous attaquent n'ont pas toujours du talent. C'est pour cela qu'il ne leur reste souvent que la vulgarité". Qu'à cela ne tienne, M. Dantzig. Je suis une lectrice. Indubitablement. Et je ne lis pas pour recevoir l'approbation des autres, ni pour prouver quoi que ce soit, mais bien parce que ça me plaît. Et ce «Pourquoi lire?», malgré, ou peut-être à cause des bouillonnements de mon esprit, de ces échauffements des susceptibilités, il m'a plu! Un des meilleurs essais pour comprendre que parfois, il faut savoir en prendre et en laisser!


Lili lui donne: ★ ★ ★ ★ ☆

dimanche 6 février 2011

Les tribulations d'une caissière

Par Anna Sam, LGF, Le livre de poche

«Que voit-on du monde et des gens quand on les voit du point de vue d’une caissière de grande surface? Que sait-elle de nous en voyant ce que nous achetons, ce que nous disons, les questions que nous posons? Le passage en caisse est en réalité un moment très particulier. À tort, nous pensons que tout est neutre dans cette opération et nous ne nous surveillons pas. La caissière est pour nous un regard aveugle, à la limite elle est elle-même une machine. Nous nous montrons donc comme nous sommes. Et lorsque la caissière s’appelle Anna Sam, qu’elle est titulaire d’une licence de lettres et qu’elle n’a pas les yeux dans la poche de sa blouse, elle saisit sur le vif nos petits mensonges, nos petites lâchetés, nos habitudes plus ou moins bizarres, et elle en fait un livre qui ne ressemble à aucun autre.»

Sympathique et cocasse compte-rendu de la vie derrière une caisse enregistreuse. Les anecdotes sont habilement narrées et le ton style «guide non-officiel de la nouvelle caissière» est amusant. Cela dit, comme l'auteure a vécu ses années de service à la clientèle en France, sa réalité, même si elle fait relativement écho à la nôtre, est différente et comporte nombre de référents régionaux qui perdent un brin le lecteur international. Bien sûr, le facteur humain (et ses ratés) ne change pas trop que l'on soit d'un côté de l'océan ou de l'autre, mais comme Anna Sam fait tout de même beaucoup mention du discutable cadre administratif entourant le travail de la caissière en France, on se sent vite largué et l'humour de sa trame devient moins accrocheur, moins éloquent. Charmant donc, ce petit opuscule, mais sans plus.


Lili lui donne: ★ ★ ★ ☆ ☆

samedi 5 février 2011

Oblomov

Par Ivan Gontcharov, Gallimard, Folio

«Partisan de la position allongée, Oblomov ne trouve le bonheur que dans le sommeil. Ni son ami Stolz, incarnation de l'énergie et de l'esprit d'entreprise, ni la belle Olga avec qui se nouera l'embryon d'une idylle, ne parviendront à le tirer de sa léthargie. Entreprendre et aimer sont décidément choses trop fatigantes. Grand roman de mœurs, Oblomov offre une satire mordante des petits fonctionnaires et des barines russes. La première partie du texte constitue un véritable morceau de bravoure, irrésistible de drôlerie, décrivant les multiples tentatives toutes vouées à l'échec d'Oblomov pour sortir de son lit. La profondeur du roman et la puissance du personnage d'Oblomov n'ont pas échappé à des philosophes comme Levinas. L'inertie du héros est moins une abdication que le refus farouche de tout divertissement. L'humour et la poésie sont au service d'une question que Gontcharov laisse ouverte : et si la paresse, après tout, était moins un vice qu'une forme de sagesse?»

À lire un jour...

vendredi 4 février 2011

La marche du crabe - La condition des crabes

Par Arthur de Pins, Soleil Production, La marche du crabe 1

«Depuis 400 millions d’années, toutes les espèces de crabes évoluent dans la joie et l’allégresse. Toutes sauf une : le Cancer Simplicimus Vulgaris, ou crabe carré. Cette sous-espèce de crustacés peuplant les rivages de l’Estuaire de la Gironde est frappée, depuis des millénaires, d’une étrange tare : elle ne peut changer de direction, et est condamnée à marcher selon une même ligne droite! Mais... durant un été comme les autres, pendant que les vacanciers profitent du soleil et des congés payés, trois petits crabes carrés vont se rebeller, et bouleverser ainsi l’écosystème tout entier!»

Une découverte sensationnelle que cette trilogie du crabe! J'ai ouvert la BD pour la feuilleter distraitement et l'histoire m'a happée immédiatement; je n'ai pu reposer l'album qu'une fois la dernière page tournée. Adaptée d'un court métrage, l'histoire d'Arthur de Pins sort délicieusement des sentiers battus et entraîne le lecteur vers une perspective nouvelle: celle du micro versus le macro. La stucture du récit est enlevante, les situations joyeusement saugrenues et les dialogues tissés d'un humour fin et juste. Si la mise en image m'est apparue un brin dépouillée de prime abord (les traits des illustrations ne sont pas sans rappeler un arrêt sur image en animation cinématographique), je me suis vite attachée à la représentation de ces crabes rebelles et de leur univers. Un vrai petit chef d'oeuvre de la BD! «La suite, bon Dieu, la suite!», comme disait l'autre...


Lili lui donne: ★ ★ ★ ★ ★  

We are in a Book!

Par Mo Willems, Hyperion Books for children, An Elephant & Piggie Book

«Gerald is careful. Piggie is not. Piggie cannot help smiling. Gerald can.Gerald worries so that Piggie does not have to. Gerald and Piggie are best friends. In We Are in a Book! Gerald and Piggie discover the joy of being read. But what will happen when the book ends?!»

Totalement déjanté comme album! Mo Willems use d'une efficace et délicieuse simplicité pour présenter ses deux personnages qui découvrent les joies et le pouvoir d'être les «maîtres» d'un livre... et de ses lecteurs. Le plaisir déchaîné de Gerald et Piggie est communicatif et, dès la dernière page tournée, donne tout de suite le goût de relire leur aventure! Une série de livres pour les plus jeunes qui semble très prometteuse... et surtout, très plaisante pour celui qui les lira à voix haute, et ce, peu importe son âge!


Lili lui donne: ★ ★ ★ ★ ☆

jeudi 3 février 2011

Les enfants moroses

Par Fannie Loiselle, Marchand de feuilles

«"Les enfants moroses" croient en la beauté de ce qui est oublié : le calendrier de l'avent, acheté en solde après les fêtes ; un coquillage rose et blanc, trouvé dans la rue, en plein centre-ville ; une lettre de rupture, récupérée dans un bac à recyclage, et griffonnée au verso d'une recette de pain aux bananes. Grâce à ces artefacts, le bonheur se coagule dans la monotonie du quotidien. Une femme produit trop de lait maternel et le tire, souhaitant s'en servir afin de faire la cuisine pour ses collègues ; un homme parle de la pyramide de Maslow : où trouver le bonheur alors que sa vie n'est pas menacée? Les narrateurs abandonnés à leur solitude transforment le quotidien en petites épiphanies. Les enfants moroses est un livre qui dévoile comment les contes de fée entendus dans l'enfance nous marquent parfois d'une manière secrète, posant à notre insu les balises d'une certaine conception du monde. Un livre qui, avec une grande subtilité, mêle passé et futur, souvenirs et prophéties. A la lecture des miniatures qui composent Les enfants moroses on s'éclaire de l'intérieur.»

Récit déconstruit en miniatures de quelques pages; un rythme plutôt déconcertant pour le lecteur, avec sa structure en toile d'araignée et ses étourdissants retours dans le temps. La plume de Fannie Loiselle est terriblement sombre, sue le mal de vivre et l'inertie. Ses personnages sont pris au piège et ne savent que tourner en rond ou s'échouer, terrassés par la lassitude et l'impuissance. J'ai enduré ce livre patiemment, en lectrice déterminée que je suis parfois, plongée jusqu'au tréfond de l'âme dans le malaise un brin chaotique des mots de Loiselle... et puis, une fois la dernière page tournée, je l'ai refermé avec un long soupir de soulagement! Quelle déception qu'a été pour moi ce petit opuscule pourtant si prometteur! De tristes miettes de fiction oscillant entre deux genres littéraires, ni nouvelle, ni récit, au grand déplaisir du lecteur... Seule l'illustration de la couverture demeure touchante...

Lili lui donne: ★ ★ ☆ ☆ ☆

mercredi 2 février 2011

Manu à la plage

Scénarisé par Ed, illustré par Diego Arandojo, Éditions Bang, Mamut 3+

«En vacances avec ses parents, Manu découvre pour la première fois la plage. Que fait tout se sable entre mes doigts de pieds? Pourquoi dois-je me mettre toute cette crème? Où est la télé? Crabes colorés qui marchent de côté? Montagnes d’eau qui n’arrêtent pas de bouger? Et... qu’est donc cette chose qui se cache sous le sable? Quelques mystères que Manu mettra à jour avec l’aide de sa petite pelle, un jour ensoleillé de Juillet.»

Sympathique première BD pour les tout-petits! La scénarisation d'Ed est très dynamique et éloquente, entraînant sans difficulté le lecteur dans le monde fantaisiste de l'enfance. Quant aux illustrations de Diego Arandojo, leur simplicité efficace et colorée capte l'attention et fait s'épanouir l'univers d'Ed au grand plaisir du lecteur. Une belle idée pour les futurs rats de bibliothèque, impatients de "lire" un livre tout seul!


Lili lui donne: ★ ★ ★ ★ ☆

La fontaine de Marguerite

Par Rachel Elliot, illustré par Petra Brown, Les 400 coups

«Marguerite la souris est magnifique et étincelante lorsqu'elle danse autour de la fontaine. Benjamin, lui, aimerait bien danser avec elle mais il est beaucoup trop timide et il a peur de lui parler. Seulement, quand le vilain rat Rudolph décidera d'importuner la belle Marguerite, Benjamin réalisera comme il est brave et courageux.»

Jolie historiette aux illustrations émouvantes. Si la trame est un brin prévisible et le ton un poil trop moralisateur, l'aventure visuelle qu'offre Petra Brown donne à elle seule une excellente raison de lire l'album. Une histoire à dévorer avec les yeux surtout, bref... en se délectant de la finesse de l'imaginaire créé par l'illustratrice...


Lili lui donne: ★ ★ ★ ☆ ☆


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mardi 1 février 2011

Quel éléphant?

Par Geneviève Côté, Scholastic

«Les éléphants ne forcent pas la porte des gens. Ils ne s’assoient pas sur leur canapé (du moins, ils ne le devraient pas) et ils ne se prélassent jamais sous leur douche (ils ne devraient pas faire cela non plus). Georges parle à ses amis de son hôte indésirable, mais, comme ils se moquent tous de lui, il décide de faire comme si aucun éléphant n’avait envahi sa maison.»

Un album aux illustrations d'une surprenante candeur!... et quelle histoire rafraîchissante! Geneviève Côté joue fort habilement de la plume, proposant des personnages attachants essayant tant bien que mal de se débrouiller dans une situation plutôt saugrenue et peu commune, rendant l'improbable fascinant et drôle. Et puis, quelles illustrations! J'ai vraiment eu un coup de coeur pour son trait brouillon et sensible, croquant une expression ici, découvrant un détail inusité là, bref, faisant s'épanouir l'histoire avec brio. Savoureux...


Lili lui donne: ★ ★ ★ ★ ★  

Mes grands frères et moi

Par Cary Fagan, illustré par Luc Melanson, Scholastic

«Trois frères, trois fois plus de plaisir? Évidemment, avec trois garçons dans une même famille, il y du plaisir à profusion, mais aussi beaucoup de sottises et de mésaventures… Les trois frères mettent accidentellement le feu à l’arbre du voisin. Ils jouent au football dans le salon et organisent même des funérailles pour leur lézard! Pendant toutes leurs folles aventures, les grands frères ne sont pas toujours gentils avec le plus jeune. Que ressent ce dernier? Il s’amuse tout autant que ses grands frères et profite pleinement de la vie, pour le meilleur et pour le pire!»

Un joli album coloré et vif, qui fait rigoler le lecteur! La plume de Cary Fagan fait découvrir avec un plaisir évident l'univers très sélect des frères et des soeurs. À cheval sur les illustrations évocatrices de Luc Melanson, nous plongeons avec délectation au coeur des aventures rocambolesques de ces trois inséparables complices. Plusieurs petits coquins en herbe s'y reconnaîtront! Un histoire parfaite pour les futurs joueurs de tours!...


Lili lui donne: ★ ★ ★ ★ ☆


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